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Le Conseil national des universités, version Corbo, ralliera- t-il le milieu?

S’appuyant sur le résultat des consultations tenues dans le cadre du chantier sur un Conseil national des universités ainsi que sur l’expérience du Conseil des universités du Québec entre 1968 et 1993, Claude Corbo recommande la création d’un Conseil national des universités (CNU). Cette recommandation est appuyée par le rapport Bissonnette Porter portant sur une loi-cadre des universités.

Pourquoi?

La persistance de questions et d’enjeux majeurs concernant l’institution universitaire, la nécessité d’un organisme qui traite de façon ordonnée, efficace et transparente ces enjeux, les expériences positives d’organismes canadiens et étrangers et la contribution essentielle aux débats de société que peut apporter un conseil des universités représentent les principaux arguments des partisans d’un tel organisme. Le CNU proposé serait créé par la voie législative en tant qu’organisme public indépendant doté d’une autonomie conceptuelle, opérationnelle et administrative.

La mission d’un éventuel Conseil national des universités a éveillé plusieurs préoccupations. Le CNU ne devrait pas restreindre les pouvoirs des conseils d’administration (les recteurs et les présidents des c.a. des universités) ni se substituer à ceux-ci; il ne pourrait être décisionnel (CREPUQ). Le CNU verrait à la coordination des activités, alors que l’évaluation de l’enseignement et de la recherche demeurerait la prérogative du milieu universitaire (corps professoral). Le CNU devrait faire des études et conseiller le ministre (étudiants). Il devrait rechercher une diminution du fardeau bureaucratique et éviter les dédoublements (Conseil du patronat). Enfin, le CNU ne devrait pas réduire les pouvoirs du ministre (gouvernement).

Quel est donc le mandat proposé du Conseil national des universités?

Claude Corbo propose trois missions pour le Conseil national des universités :

  1. concourir à l’évaluation et à l’attestation de la qualité des activités universitaires;
  2. agir comme conseil stratégique auprès du ministre;
  3. contribuer à l’orientation générale et à l’amélioration du système universitaire.

Concrètement, les trois missions proposées se traduisent dans une série de tâches. Les résultats des travaux du CNU seraient transmis au ministre et aux établissements universitaires et rendus publics.

1. Concourir à l’évaluation et à l’attestation de la qualité des activités universitaires

  • Faire connaître les meilleures pratiques pédagogiques
  • Établir les normes en matière de politique d’évaluation des programmes et analyser les résultats de la mise en œuvre de ces politiques dans les établissements (tâches de l’actuelle commission de l’évaluation des programmes de la CREPUQ pour lesquelles les principes et règles de fonctionnement établis seraient préservés)
  • Évaluer la qualité des projets de nouveaux programmes et s’assurer du respect des conditions de mise en place (tâches de l’actuelle commission de l’évaluation des projets de programmes de la CREPUQ pour lesquelles les principes et règles de fonctionnement établis seraient préservés)
  • Examiner les pratiques en matière d’évaluation de l’enseignement, d’encadrement des étudiants et de formation à distance
  • Identifier les indicateurs de mesure du degré de réussite des activités universitaires
  • Examiner les grands enjeux de la recherche (contribution à la formation de cycles supérieurs, équilibre des diverses formes de recherche, etc.)
  • Examiner l’état et les stratégies d’internationalisation des universités

2. Conseil stratégique auprès du ministre

  • Identifier les grands enjeux et les conditions générales favorisant la qualité et l’efficacité des activités universitaires
  • Examiner l’évolution de la condition étudiante
  • Conseiller sur les bases de données et d’informations nécessaires à la bonne marche des institutions
  • Développer des projets de recherche pour mieux connaître le système universitaire
  • Proposer des objectifs à poursuivre pour améliorer le système universitaire
  • Établir la cartographie des programmes universitaires
  • Analyser l’évolution des ressources attribuées à l’ensemble des institutions dans une démarche comparative avec d’autres systèmes universitaires

3. Contribuer à l’orientation générale et à l’amélioration du système universitaire

  • Donner des avis sur l’opportunité de financement d’un nouveau programme
  • Donner des avis sur le déploiement des établissements universitaires
  • Donner des avis sur l’agrément d’organismes universitaires non québécois
  • Recommander des mesures pour assurer la collaboration entre les établissements universitaires et entre ces derniers et les autres ordres d’enseignement
  • Recommander des normes pour la reddition de compte des établissements et analyser les rapports produits par ceux-ci
  • Prendre connaissance des plans de développement des institutions et les analyser
  • Produire un rapport aux cinq ans sur l’état général du système universitaire et la mesure des réponses qu’il apporte aux besoins du Québec
  • Examiner périodiquement la formule de financement des universités et évaluer son impact tant académique qu’administratif
  • Analyser les secteurs disciplinaires (couverture suffisante, duplication, offre de places)

Composition et influence

Tel serait le mandat des 13 membres du Conseil national des universités (un président ou une présidente, 3 professeurs, un étudiant de cycle supérieur, un membre du personnel autre que professeur, 2 personnes ayant une expérience dans la haute direction et 5 personnes de la société civile, auxquels s’ajouteraient des observateurs permanents : le scientifique en chef, le président du Conseil supérieur de l’éducation, le sous-ministre responsable de l’ordre supérieur et trois observateurs étrangers). Le rapport Corbo précise en outre que le ministre serait dans l’obligation de consulter le CNU quand la question de la cohérence du système universitaire ou celle de l’autonomie des universités est en cause.

Le CNU, tel que proposé par le rapport Corbo, aurait donc le mandat d’aller chercher beaucoup de renseignements relatifs au fonctionnement des universités et de les transmettre au ministre, aux établissements et au grand public. Si, comme le veut l’adage, «l’information, c’est le pouvoir», un tel mandat rassurera-t-il les personnes qui craignent de voir leur indépendance rognée par la création du CNU? Les premiers mois de vie d’un éventuel Conseil national des universités seront déterminants pour voir comment le ministre réagira aux constats mis de l’avant par l’organisme.

Références

Corbo, Claude,  Pour mieux servir la cause universitaire au Québec : le Conseil national des universités, ministère de l’enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, juin 2013, 119 p.

Dutrisac, Robert, «Place au Conseil national des universités», Le Devoir, 28 juin 2013.

Parchemal, Blandine,  Le Conseil des universités : réforme managériale et soumission des universités à la concurrence internationale (notes de recherche), Institut de recherche et d’information socioéconomiques (IRIS), octobre 2013, 24 p.

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