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Des pratiques d’enseignement favorisant la réussite

Dans le cadre de sa recherche effectuée au niveau collégial, Pelletier (2024) fait part de 10 pratiques enseignantes susceptibles d’influencer le SEP de personnes étudiantes en enseignement supérieur qui sont résumés dans le Tableau 1.

Tableau 1 : Pratiques enseignantes reliées au SEP à réussir ses études (Pelletier, 2022, p. 114-115)

Dimensions Descriptions
1 Apprentissage collaboratif et modelage par les pairs Pratiques centrées sur l’étudiant favorisant les expériences de maitrise par l’apprentissage actif en encourageant, par exemple, les échanges d’idées, l’entraide, les exercices de réflexion et de résolution de problèmes.
2 Rétroactions Rétroactions descriptives fournies en cours d’apprentissage visant à informer les étudiants de leurs progrès et à les guider vers la prochaine étape d’apprentissage. Cette dimension est reliée à la persuasion sociale.
3 Clarté des tâches et organisation Pratiques consistant à préciser les tâches à accomplir et à établir les règles de fonctionnement et l’organisation générale d’un cours. Ces pratiques visent à rendre l’environnement et les exigences prévisibles.
4 Défis d’apprentissage et choix des tâches Pratiques liées à la présentation de tâches authentiques, stimulantes, utiles en dehors du milieu scolaire ou pertinentes pour la suite des études. Ces pratiques favorisent les expériences de maitrise.
5 Offrir des choix Pratiques consistant à offrir des choix aux étudiants, par exemple, différents modes de réalisation des travaux ou des choix d’activités d’évaluation. L’enseignant peut également demander l’opinion des étudiants puis ajuster le cours selon les préférences exprimées.
6 Modelage par l’enseignant ou par d’autres modèles Démonstrations faites par des modèles pertinents et crédibles qui verbalisent et soulignent les difficultés potentielles associées à la tâche effectuée. Cette dimension permet de soutenir les expériences vicariantes.
7 Messages de peur Paroles prononcées par l’enseignant surtout avant les examens qui insistent sur le niveau de difficulté d’un cours et sur les conséquences négatives associées à un échec. Contrairement aux autres dimensions décrites dans ce tableau, ces pratiques ne sont pas recommandées et risquent de diminuer le SEP des étudiants.
8 Messages d’efficacité Communications d’attentes élevées aux étudiants qui réitèrent les stratégies et les ressources disponibles pour soutenir leur réussite. Cette dimension est étroitement liée à la persuasion sociale.
9 Relations positives Pratiques contribuant à établir une relation de confiance et un climat de classe positif. L’enseignant s’intéresse aux étudiants en tant que personnes et facilite des échanges agréables entre les étudiants afin de favoriser leur bien-être en classe.
10 Traitement des erreurs Pratiques favorisant la prise de risques par les étudiants. L’enseignant considère que les erreurs font partie du processus d’apprentissage, et ainsi invite les étudiants à poser des questions et à apprendre de leurs erreurs.

 

Reprenons ces dimensions pour en expliquer l’effet sur la réussite étudiante en nous basant sur les principes présentés dans l’article Des facteurs favorables à la réussite étudiante.

Dimension 1. La première dimension, l’apprentissage collaboratif et le modelage par les pairs, intervient premièrement au niveau du sentiment de contrôlabilité par la responsabilité qui incombe à la personne étudiante de prendre en charge la réalisation de la tâche. Cette dimension contribue aussi au SEP puisque le travail avec les pairs constitue un contexte plus sécurisant que d’intervenir devant l’ensemble du groupe ou devant un expert du domaine (indices psychophysiologiques). Le modelage par les pairs implique de voir l’autre, à qui on peut s’identifier, démontrer une réussite (expérience vicariante). Le cadre de référence (background) des pairs étant généralement plus similaire que celui de la personne enseignante, les mots et exemples que ce pair utilise pour expliquer ont plus de chance de convenir au cadre de référence de la personne étudiante, facilitant la compréhension commune.

Dimension 2. Pour la deuxième dimension, la rétroaction, nous allons dans le même sens que Pelletier (2022) dans son tableau et l’associons à la persuasion sociale. Pour ce faire, il faut toutefois réaliser une rétroaction constructive qui explique l’erreur et donne des suggestions de solutions accessibles, tout en encourageant la personne qu’elle a la capacité de réussir.

Dimension 3. La troisième dimension, la clarté des tâches et l’organisation, supporte le SEP. Lorsque la tâche est compréhensible, la perception de la probabilité de réussite est effectivement plus grande.

Dimension 4. La quatrième dimension, défis d’apprentissage et choix des tâches, implique que les tâches proposées aux personnes étudiantes soient authentiques et stimulantes. Alors que Pelletier (2022) l’associe à l’expérience de maîtrise liée au SEP, nous y voyons surtout un lien avec la valeur de la tâche (intérêt et perception d’utilité) qui est un facteur de motivation.

Dimension 5. La cinquième dimension recommande d’offrir des choix, ce qui augmente le sentiment de contrôlabilité. Lorsqu’il est possible de trouver un choix qui nous convient mieux que les autres, le côté rassurant de cette option devient aussi un indice psychophysiologique favorisant le SEP.

Dimension 6. La sixième dimension correspond au modelage par l’enseignant ou par d’autres modèles. Il s’agit d’une expérience vicariante qui est toutefois moins efficace que le modelage par les pairs puisqu’il est plus difficile de s’identifier à un expert qu’à une personne ayant un profil plus proche du nôtre.

Dimensions 7 et 8. Les messages de peur, correspondant à la septième dimension, et les messages d’efficacité, correspondant à la huitième dimension, entrent en contradiction en tant que persuasion sociale influençant le SEP. Ces deux dimensions impliquent que, pour soutenir la motivation des personnes étudiantes, il faut prendre le temps de nommer les hautes attentes, mais qu’il est important de nuancer nos propos pour éviter qu’elles ne considèrent la tâche impossible, De plus, il faut alimenter la perception de compétence des personnes étudiantes en leur rappelant leurs réussites précédentes et les ressources (internes et externes) qui leur sont accessibles pour soutenir leur réussite.

Dimensions 9 et 10. La relation positive, mentionnée comme neuvième dimension, et le traitement des erreurs, qui est la dixième dimension, sont étroitement reliées. Dans un environnement positif, la personne apprenante se sentira plus en sécurité et pourra se permettre d’oser sortir des sentiers battus. De même, lorsqu’une erreur commise durant l’apprentissage est utilisée de façon constructive pour continuer le développement des compétences, un climat de confiance s’installe. Du point de vue de la réussite, la relation positive rend plus efficaces les encouragements provenant de la personne enseignante. Lorsque les erreurs sont comprises comme la base du développement, elles ne sont plus l’inverse de la réussite, mais seulement une étape intermédiaire vers celle-ci. Ainsi, ces deux dimensions font en sorte que la personne étudiante se sente plus en confiance de pouvoir réussir et l’encourage à continuer.

Le travail de la personne enseignante est de fournir aux personnes étudiantes un contexte favorable à leur réussite et les dix dimensions présentées y contribuent en augmentant la motivation, le SEP et le sentiment de contrôlabilité de la personne étudiante. La décision de s’engager dans la tâche et dans ses études reste toutefois l’apanage de la personne étudiante et il en découle que sa réussite est sous sa responsabilité. Même une parfaite maîtrise de ces dix dimensions par la personne enseignante ne garantit pas que toutes les personnes étudiantes réussissent. Il est important d’en être conscient pour éviter que l’échec d’une personne ne soit ressenti comme un échec personnel pour la personne enseignante, réduisant son SEP à enseigner, sa motivation à développer ses méthodes pédagogiques et son engagement envers la réussite des personnes étudiantes dans son cours.

Références

Pelletier, C. (2022). Sentiment d’efficacité personnelle à réussir ses études : l’influence des pratiques enseignantes au collégial [thèse de doctorat]. Université Laval.

Pelletier, C. (2024). Cultiver le SEP lié à la réussite des études pour enrichir la santé mentale étudiante. Pédagogie collégiale, 37(2), 74-83.

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