Une boutade veut que les salles de classe aient si peu changé en 200 ans qu’un enseignant du 19 e siècle y serait encore à son aise. De fait, on peut se demander s’il est possible ou même utile de réinventer les locaux de cours pour améliorer le transfert de connaissances. Plusieurs institutions développent donc des organisations physiques de classe mieux adaptées à une pédagogie plus active, comportant souvent un soutien technologique.
Dans un billet sur le site Campus Technology, le professeur Trent Batson décrit des changements aux espaces de classe caractéristiques de cette tendance. Souvent occasionnées par l’adaptation des locaux à la technologie, ces modifications permettraient de mobiliser les participants et de les amener à collaborer davantage :
Les salles de classes sont divisées selon de nouvelles formes géométriques (salles carrées ou circulaires plutôt que rectangulaires) afin de permettre le visionnement de documents multimédias à partir de différents angles. Pour les mêmes raisons, l’éclairage peut souvent être tamisé.
Le mobilier et les revêtements de surface sont remplacés. On ajoute tapis et tuiles acoustiques, alors que les meubles sont désormais sur roulettes. Des chaises ayant des surfaces coussinées, donc plus confortables, remplacent celles avec des surfaces dures. «The new learning spaces are not designed around the acoustics of one voice but around the acoustics of many voices; not designed for the furniture to stay in one place for one purpose but to move the furniture into varying arrangements.»
L’espace physique se prolonge dans l’espace virtuel, grâce au matériel et aux logiciels nécessaires à l’accès aux différents outils hébergés sur le Web en dehors des heures de cours. Le travail en classe se concentre donc sur de l’accompagnement par l’enseignant.
Par exemple, un projet pilote a permis à l’Université du Minnesota de se doter l’an dernier de deux salles dédiées à l’enseignement de la biologie et du génie informatique, qui peuvent accueillir respectivement 117 et 45 personnes. Elles sont équipées de tables rondes autour desquelles neuf personnes peuvent prendre place et s’installer avec leurs ordinateurs portables. L’enseignant se trouve au centre de la pièce, devant un poste de travail qui lui permet de diffuser différentes informations sur un immense tableau interactif pouvant projeter sur tous les murs de la salle
Bénéficiant d’installations à la fine pointe de la technologie, ces deux classes pilotes se démarquent également en ce qu’elles peuvent facilement être reconfigurées selon les besoins : murs rétractables, flexibilité du mobilier, etc. Une vidéo de 4 minutes donne un bon aperçu de l’ambiance d’une telle classe.
SCALE-UP
C’est vraisemblablement l’Université de Caroline du Nord (NCSU) qui, dès 2001, a ouvert le bal avec le concept SCALE-UP (pour Student-Centered Active Learning Environment for Undergraduate Programs).
Le bulletin Clic a préparé un dossier sur le sujet et, sur la Vitrine Technologie-Éducation, on peut entendre une entrevue particulièrement intéressante avec le professeur de physique Robert J. Beichner, de NCSU, instigateur du projet original. Selon lui, dix ans de recherche empirique démontrent que ces environnements ont un impact bien réel sur la réduction de l’échec et la qualité de l’apprentissage.
D’inspiration sociocontructiviste, centrées sur l’expérience d’apprentissage, ces nouvelles classes sont conçues dans le but premier de stimuler l’intérêt des étudiantes et étudiants. La formatrice ou le formateur circule entre des îlots où sont réparties des équipes qui travaillent à résoudre des tâches concrètes. L’enseignant y est alors davantage un guide, un animateur et un facilitateur.
Ces salles permettraient d’emblée une meilleure interaction entre les apprenants et la personne enseignante, en plus de favoriser le travail collaboratif.
De telles réorganisations des locaux en «configuration restaurant» commencent à faire des petits. L’entrée Wikipedia traitant du projet affirme : «Nearly 100 colleges across the US and around the world have directly adopted the SCALE-UP model and adapted it to their particular needs.» On y parle même de studio courses pour qualifier le style d’enseignement conditionné par ces espaces.
D’autre part, on évoque l’approche TEAL (Technology Enabled Active Learning) du Massachussets Institute of Technology, également inspirée de SCALE-UP.
Au Québec
Au Québec, la presse généraliste a récemment fait état de l’«hyperclasse» à l’école primaire Wilfrid- Bastien de Saint-Léonard ou du programme Protic à l’école secondaire Les Compagnons-de-Cartier de Sainte-Foy.
De même, une expérience est actuellement menée au collège Dawson où des laboratoires de physique ont été transformés selon ce modèle, favorisant l’apprentissage par les pairs. «Cette réussite est cependant assortie d’une somme considérable de travail de la part de l’enseignant», d’après une des conclusions de l’étude.
Par ailleurs, McGill vient d’intégrer deux de ces classes à l’été 2009, mais a mandaté un groupe de travail qui se penche sur le meilleur soutien à offrir aux enseignants qui souhaitent les utiliser.
Enfin, un groupe EDUCAUSE nommé Learning Space Design poursuit la réflexion sur la manière dont les formateurs peuvent repenser et mieux utiliser les espaces physiques d’enseignement. On peut y consulter diverses ressources.