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Améliorer ses compétences de collaboration par une meilleure connaissance de soi et des outils 

Les autrices sont conseillères pédagogiques au Centre universitaire de formation en environnement et développement durable 

En environnement, tout comme dans plusieurs domaines, les personnes étudiantes doivent apprendre à collaborer en misant sur la richesse des compétences et des personnalités de chacun, afin de résoudre des problématiques complexes et de produire des travaux de qualité. 

Depuis plus d’une vingtaine d’années, le travail collaboratif est au cœur des programmes de premier et de second cycle au Centre universitaire de formation en environnement et développement durable (CUFE).  Selon notre expérience, le développement d’une meilleure connaissance de soi chez les personnes étudiantes semble leur permettre d’être plus sensibles et de mieux comprendre les enjeux interpersonnels vécus au sein de leurs équipes, ainsi que d’y répondre de manière plus ajustée. De plus, pour que le travail collaboratif soit un levier de performance et d’innovation dans une équipe, nous pensons qu’il ne doit pas s’improviser, mais qu’il doit faire partie intégrante des enseignements. L’équipe du CUFE a donc mis en place des pratiques et des outils pédagogiques visant à encadrer le développement des compétences de collaboration et l’intégration consciente de compétences socio-émotionnelles dans les interactions entre personnes étudiantes au sein d’une équipe. Le but ultime est de leur permettre de tirer un maximum d’avantages du travail collaboratif, et ce, du début jusqu’à la fin du programme.  

[Les documents mentionnés dans cet article sont des ressources éducatives libres (REL) qui font partie de la Trousse d’outils de travail collaboratif, que le CUFE a gracieusement rendue disponible en ligne sur la plateforme Zenodo.] 

Journée d’accueil du programme au 1ercycle  

Lors de la Journée d’accueil au baccalauréat, les personnes étudiantes s’initient aux compétences essentielles à une bonne collaboration, tout en apprenant à mieux se connaitre.  

D’abord, elles autoévaluent leurs styles de communication dominants à partir de l’outil développé par Solange Cormier et disponible dans les pages Savoir-être à l’UdeS. Les équipes sont ensuite formées de personnes ayant différents styles de communication. 

Le contexte dans lequel les équipes sont mises en action est inspiré de défis d’ingénierie : les personnes doivent collaborer pour atteindre un objectif dans un temps limité. La limite de temps vise à exacerber les réflexes de communication de chacun. Avant d’amorcer le défi, chaque membre doit expliquer son style de communication et se donner un objectif (p. ex. : puisque j’ai tendance à être centré sur l’action et que je peux paraitre impatient ou autoritaire, mon défi est de prendre le temps d’écouter les autres). Lorsque le défi est terminé, les personnes partagent leurs expériences (ex. : défis rencontrés, leviers utilisés, évolution du fonctionnement de l’équipe) dans le but de faire ressortir certaines dimensions cognitives et affectives du travail collaboratif.  

Ensuite, pour favoriser l’intégration des apprentissages, une réflexion individuelle est réalisée afin d’identifier quelques éléments importants dont chaque personne a besoin pour être à son meilleur au sein d’une équipe, selon son style de communication. Le partage permet ensuite à l’ensemble du groupe de prendre conscience des stratégies à adopter selon le style de communication de l’autre. 

Finalement, les personnes étudiantes remplissent seules ou en dyade une Grille d’autoévaluation et de discussion de la compétence de collaboration développée par le CUFE. Elles sont invitées ensuite à partager leurs réflexions dans un objectif d’approfondissement et d’amélioration personnelle. 

Formation intensive au 2e cycle – ENV898 S’outiller à la collaboration  

À la maîtrise et au diplôme supérieur d’études spécialisées (DESS), la formation intensive, ENV898 S’outiller à la collaboration, a comme objectif d’apprendre à se connaitre, à collaborer et à s’améliorer au sein d’une équipe de projet. Cette formation obligatoire de zéro crédit d’une durée de deux jours est offerte aux première (jour 1) et cinquième semaines du trimestre (jour 2). 

Jour 1 – Apprendre à se connaitre et à collaborer  

Dans un premier temps, les personnes étudiantes doivent réfléchir aux privilèges et aux facteurs de stress qu’elles ont vécu jusqu’à ce jour dans leur parcours, ainsi qu’au bagage de compétences avec lequel elles arrivent. Par la suite, le partage en grand groupe favorise une prise de conscience qui amène une plus grande ouverture à l’autre et à la pluralité des contextes, mais aussi à la richesse de toute cette diversité.  

Dans un second temps, en équipe, les personnes doivent discuter afin de prendre position sur une question environnementale posée. L’exercice est en fait un prétexte pour faire ressortir au sein des équipes les principaux comportements observables associés aux différents styles de communication et d’apprentissage des personnes (Dunning, 2008). À partir des enseignements reçus, chaque personne doit identifier ses comportements personnels et les comportements observés chez ses collègues (p. ex. : je réfléchis à voix haute, j’écoute plus que je ne parle). Le partage en équipe des observations réalisées permet ensuite de reconnaitre la diversité des styles de communication et d’apprentissage présents au sein d’une équipe. Par la suite, à partir des enseignements reçus, chacune des équipes doit identifier des manières de mieux interagir et travailler ensemble, pour tenir compte des styles de chacun.  

En deuxième partie de cette première journée, des enseignements visant à développer les habiletés de planification et de gestion du travail collaboratif sont présentés. Pour bien fonctionner en équipe, il importe d’avoir dès le départ… 

  1. des objectifs clairs et partagés,  
  1. des règles de fonctionnement bien établies et comprises par tous, 
  1. une communication efficace, ainsi 
  1. qu’une définition claire des rôles et des responsabilités de chacun.  

De plus, il importe de… 

  1. bien planifier la démarche de travail,  
  1. bien structurer les rencontres en équipe, ainsi que  
  1. se donner des processus de suivi et d’amélioration continue du travail.  

L’intégration de ces enseignements est réalisée par l’élaboration d’une entente d’équipe, laquelle contient tous les éléments essentiels à la bonne planification du travail en équipe. De plus, afin de bien accompagner les personnes étudiantes, une Trousse à outils pour le travail collaboratif est mise à leur disposition. Des gabarits d’ordre du jour et de compte-rendu y sont présentés pour bien planifier et gérer les réunions en équipe ainsi qu’une grille d’évaluation des réunions permettant d’apprécier et d’améliorer la qualité de celle-ci selon, notamment, la préparation des membres, l’efficacité des échanges ainsi que le respect des objectifs fixés. Finalement, l’outil d’évaluation des pairs permet d’évaluer la contribution de chacun des membres d’une équipe à la collaboration et à la qualité du travail produit selon plusieurs critères. Cette pratique permet de renforcer la cohésion du groupe tout en stimulant l’amélioration personnelle. 

À la fin de cette première journée, les équipes sont prêtes à entamer leur collaboration dans les cours de manière la plus efficiente possible. 

Jour 2 – Première partie

Prévenir les conflits au sein d’une équipe  

Après cinq semaines de travail, les équipes sont rencontrées pour une seconde journée de formation.  Les enseignements permettent d’abord aux personnes étudiantes de découvrir ce qu’est un conflit et comment celui-ci peut se développer au sein d’une équipe. Ensuite, une première autoévaluation les amène à identifier leurs réactions et comportements habituels face à un conflit (Villeneuve et Motoi, 2015). Sous forme de discussion en équipe, chacun partage ses automatismes en explicitant le tout par des situations vécues. Ensuite, chaque personne doit identifier ses comportements et réflexes habituels qui facilitent ou qui nuisent à la prévention des conflits et se donner un objectif d’amélioration personnel, lequel est ensuite partagé en grand groupe.  

Finalement, en ayant en tête la dynamique actuelle de leur équipe de travail, chaque personne réalise une autoévaluation des défis rencontrés ou anticipés. À la suite d’un partage à tour de rôle des constats, chaque équipe doit choisir un défi rencontré ou anticipé sur lequel elle souhaite agir et identifier des actions à mettre en place pour le relever afin de prévenir les conflits. 

Jour 2 – Deuxième partie

Favoriser la collaboration et la production d’un travail de qualité en équipe par la rétroaction durable  

La rétroaction faisant partie des influences les plus puissantes sur la performance individuelle et en équipe, il importe de développer chez les personnes étudiantes leurs compétences à donner une rétroaction de manière constructive à leurs pairs ainsi qu’à utiliser une rétroaction reçue pour s’améliorer. Les enseignements et les exercices pratiques permettent d’initier les personnes étudiantes aux principales caractéristiques et dimensions d’une rétroaction durable, de développer leurs habiletés à formuler une rétroaction constructive sur le travail de leurs pairs, ainsi que leur capacité à critiquer leur démarche de travail. Le tout, dans le but que chaque membre livre un travail de qualité, qui répond aux attentes, favorisant ainsi une collaboration saine

Un accompagnement tout au long des programmes 

À la suite des activités réalisées en début de programmes, les pratiques et outils pédagogiques mis en place par le CUFE permettent de poursuivre à différents moments dans les cursus le développement des compétences de collaboration et l’intégration consciente de compétences socioémotionnelles dans les interactions au sein des équipes étudiantes. 

Par exemple, au premier cycle, la gestion des conflits, ainsi que les approches, outils, techniques et attitudes favorisant la collaboration sont renforcés dans le cadre du cours ENV117 Initiation aux événements écoresponsables, où les personnes étudiantes doivent travailler en équipe pour organiser un événement. De plus, la grille d’autoévaluation et de discussion de la compétence de collaboration est utilisée dans plusieurs cours pour permettre une évaluation des pairs à plusieurs moments dans leurs parcours, de manière formative ou sommative. 

Tant au premier qu’au deuxième cycle, une fiche de contribution des membres d’une équipe doit être remise systématiquement avec chacun des travaux d’équipe afin de mettre en lumière et de gérer les problématiques de contributions inégales. De plus, les compétences de collaboration, de même que la Trousse à outils (présentée ci-dessus) sont réinvesties dans le cadre d’un projet en environnement (ENV655 et ENV838) réalisé, en équipe, pour le compte d’une organisation partenaire. Mentionnons également que la Trousse à outils est mise à la disposition des personnes étudiantes dans tous les cours Moodle des programmes.  

Par ailleurs, le développement de compétences socioémotionnelles est poursuivi au deuxième cycle dans le cadre du cours ENV 836 Posture d’accompagnement, qui permet de bonifier l’approche d’accompagnement au changement des personnes étudiantes.  

En conclusion, le développement des compétences de collaboration et l’intégration consciente de compétences socioémotionnelles dans les interactions au sein des équipes étudiantes s’effectue à partir de plusieurs ancrages au sein des programmes du CUFE, lesquels permettent de tirer le maximum d’avantages du travail collaboratif, et ce, du début jusqu’à la fin du programme. 

Références 

Dunning, D. (2008). Introduction to type and learning. The Myers Briggs Company. 

Villeneuve, L. et Motoi, I. (2015). Guide de résolution de conflits dans le travail en équipe. Presses de l’Université du Québec.  

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